Dans un rapport remis hier par Bruno Patino à Christine Albanel, ministre de la Culture, sont évoqués les problèmes du livre numérique et de l'avenir de l'édition alors que se profilent de plus en plus d'ebooks dans les étals des
cybermarchands.
Afin de préserver la création et les droits, plusieurs points ont été mis en avant dans le rapport. Tout d'abord, une offre légale doit être proposée, qui saura réunir trois points essentiels : « l’interopérabilité des contenus numérisés, les possibilités de référencement de ces contenus dans l’univers numérique et l’importance et la diversité de l’offre ». À ce titre, la gestion des DRM qui avait tant fait couler d'encre pour la musique numérique sera étudiée autant que la question des formats. En effet, le rapport insiste bien sur une présence trop agressive des mesures de protection : la finalité est moins de lutter contre le piratage que de proposer une offre légale qui saura séduire les consommateurs.
Pirater les pirates
De fait, les pirates trouveront toujours le moyen de contourner les mesures de protection. Ainsi, développer une offre légale attrayante pourrait s'avérer la meilleure des luttes contre le piratage, en instaurant une relation de confiance entre le distributeur et le client. Une offre qui serait « loyale »
et qui aurait par ailleurs un second effet. En s'appuyant sur des formats harmonisés, cette dernière empêcherait le monopole d'une offre basée sur un format propriétaire, mais surtout préviendrait des ventes liées, comme ce peut être le cas aujourd'hui, avec le Reader de Sony ou le Kindle d'Amazon. « En favorisant l’interopérabilité, deux objectifs sont atteints : la satisfaction des consommateurs et la difficulté pour un acteur d’acquérir une position dominante. »
Défendre la propriété intellectuelle
La propriété intellectuelle, parfois malmenée dans le cadre des films et de la musique, sera étudiée, et intégrera probablement des éléments nouveaux. Cependant, le rapport indique clairement qu'il ne faut pas « modifier le code de la propriété intellectuelle », qui en l'état peut « accommoder l'entrée dans le numérique ». D'autre part, il sera nécessaire d'ouvrir « des discussions interprofessionnelles sur les droits d'auteur ». Ces dernières devront prendre en compte « le droit moral » ainsi que « l'assiette de calcul des droits [...] pour le calcul des rémunérations proportionnelles ».
Dans le cadre de la loi Lang sur le livre unique, la définition du « livre numérique » pose un problème et semble ne pas se couler dans le moule défini par la loi, il s'agit avant tout de maîtriser le prix de vente, en confiant à l'éditeur son établissement. Ira-t-on vers un prix unique du livre numérique ? La chose n'est pas impossible.
Implication au niveau européen
Enfin, les institutions communautaires seront impliquées dans ce marché, et le rapport vise clairement l'instauration d'un « lobby de la propriété intellectuelle », pour défendre « l'application d'un taux de TVA réduit sur les biens culturels numériques ». Pour ce faire, la création d'un bureau à Bruxelles permettrait la gestation d'une politique européenne concertée.
Finalement, ce rapport semble avoir intégré les différentes problématiques rencontrées par les majors qui distribuent films ou musique, en prenant en compte non que la lutte contre le piratage soit une fin, mais que l'orientation du consommateur vers une offre attractive peut être la meilleure des luttes.